1. Pouvez-vous nous raconter brièvement votre parcours professionnel et ce qui vous a amenée à fonder l'agence Bella Ciao, spécialisée en communication responsable ?
J’ai d’abord suivi un cursus en droit avec un DEUG et une licence, avant de me réorienter vers la communication pour mon Master. Par la suite, j'ai intégré une agence interne à La Poste où j’ai occupé plusieurs fonctions, notamment celle de cheffe de projet pour la région Poitou. J’ai ensuite rejoint La Banque Postale, où j'ai acquis une solide expérience en conduite du changement et en management en tant que directrice de secteur. C’est après avoir gravi plusieurs échelons que j’ai décidé de quitter ce poste à haute responsabilité pour créer Bella Ciao en 2019. J’aspirais alors à développer un modèle, une entreprise plus en phase avec mes valeurs, tout en conservant de la diversité dans mes missions.
2. Qu'est-ce qui vous a motivée à devenir intervenante à Excelia, et comment abordez-vous vos cours sur la communication éthique ?
Mon arrivée à La Rochelle a constitué une nouvelle étape dans ma vie. Je ne connaissais personne, mais en m’intégrant dans l’écosystème local, j'ai rencontré des personnes qui intervenaient à Excelia. C’est ainsi que j’ai croisé la route d’Anne-Laure Cresp, qui dirigeait alors le Master Communication. Très vite, j’ai ressenti un besoin fort d’ajouter la transmission à mes activités professionnelles. Jusqu'à ce moment, je n'avais jamais vraiment intégré l'enseignement à mes pratiques, hormis avec des alternants en entreprise. Pourtant, partager mon expérience et mes connaissances m'est apparu comme une nécessité.
Transmettre est crucial dans notre domaine, surtout en matière de communication éthique. Il est important d’éduquer les jeunes générations, car elles ne sont pas toujours sensibilisées à ces questions. Je me sens investie d’une mission : leur montrer que la communication n'est pas uniquement un outil commercial, mais qu’elle peut être un levier pour apporter des changements positifs et responsables dans notre société.
3. Comment structurez-vous vos cours à Excelia pour former vos étudiants aux réalités de la communication éthique ?
Ma méthode d’enseignement repose sur l’équilibre entre la théorie et la pratique. Je veille à fournir des bases théoriques solides, mais je donne une importance capitale à l’aspect pragmatique de la communication. Mon objectif est de préparer les étudiants à affronter les réalités du métier, tout en restant alignés avec leurs valeurs personnelles. Nous travaillons beaucoup sur des cas concrets.
J’encourage également une réflexion critique sur la communication telle qu’elle est pratiquée aujourd’hui : les enjeux éthiques, la manipulation commerciale, et pour qui ou pour quoi la communication est utilisée. Parfois, nos discussions touchent presque à la philosophie : je les incite à remettre en question le monde qui les entoure et à réfléchir sur le sens profond de leur métier.
4. Quels sont les exercices pratiques que vous proposez pour préparer vos étudiants aux défis de la communication responsable ?
Je mets en place des exercices très immersifs, proches de la réalité professionnelle. Par exemple, je leur donne des appels d'offres à analyser : ils doivent décortiquer la demande, réfléchir à un plan de communication global, proposer des idées créatives, et même traiter la partie administrative, ce qui est souvent oublié dans les formations classiques. Nous abordons également des sujets d’actualité, pour que les étudiants soient en phase avec les tendances du secteur.
Parmi les exercices marquants, j’ai aussi expérimenté une méthode où les étudiants devaient choisir un livre qu'ils aiment et traiter un chapitre sous un format de communication différent, comme une newsletter, un reel ou une vidéo. Cela les obligeait à lire, mais surtout à créer du contenu original, en adoptant des approches diverses et en s’adaptant à des supports multiples. Ces activités les confrontent aux défis réels de la production de contenu et les amènent à réfléchir sur les formats et les canaux de diffusion.
5. Vous mettez en avant une équipe jeune et dynamique chez Bella Ciao. Comment cela influence-t-il votre approche de la communication ?
J'ai 40 ans et je travaille avec une équipe majoritairement jeune. C’est un équilibre qui fonctionne très bien, car je leur apporte mon expérience, tandis qu'ils m’apportent une expertise sur les nouveaux outils et les réseaux sociaux. Chez Bella Ciao, nous pratiquons la transparence et la co-construction. Cela nous permet de rester créatifs et d'apporter un vent de nouveauté dans nos projets. Tel a été le cas pour Élisa, étudiante à Excelia qui a récemment rejoint l'agence en alternance.
Si j’avais un conseil à donner aux étudiants qui s'intéressent à l’éthique en communication, ce serait de travailler dans un environnement aligné avec leurs valeurs. Pour moi, ça fait toute la différence de se sentir en phase avec ce que l'on fait ! » |
6. C'est quoi la communication éthique, et quels sont les principaux défis actuels dans ce domaine ?
Aujourd’hui, le principal défi dans ce domaine est de réussir à concilier une approche éthique avec des contraintes économiques. Cela demande parfois d’accepter des coûts plus élevés, que ce soit pour les matériaux utilisés ou pour des campagnes de communication qui respectent des critères éthiques. Prenons l’exemple des goodies, comme les stylos promotionnels : sont-ils fabriqués de manière responsable ? Proviennent-ils de territoires locaux ou lointains ? Est-on prêt à payer un peu plus cher pour s’assurer que tout est produit dans des conditions humaines justes et respectueuses de l’environnement ? Ce sont des questions cruciales que les communicants doivent se poser.
Le fond de la communication est également un enjeu majeur. Il ne s'agit pas seulement de vendre un produit, mais de replacer l'humain au centre de la réflexion. Une communication responsable doit être en phase avec les valeurs de l’entreprise et de son audience. Bien sûr, tout cela reste très subjectif. C'est pourquoi il est indispensable de se poser des questions en permanence, d’être curieux et de challenger les pratiques des partenaires avec lesquels on choisit de travailler.
7. Comment voyez-vous l'évolution du secteur de la communication, notamment en matière d'éthique et de responsabilité sociétale dans les prochaines années ?
L'un des défis les plus importants pour l’avenir est de réussir à accompagner les entreprises dans leur transition vers des pratiques plus responsables, sans les perdre en route. Certaines entreprises risquent de disparaître si elles ne prennent pas ce virage, et notre rôle en tant que communicants est de les guider dans cette transformation. Cela passe par une communication interne solide, qui aide les équipes à adopter de nouvelles méthodes de travail et à intégrer des pratiques plus éthiques dans leur quotidien. Il est aussi essentiel que la communication éthique soit le reflet de normes telles que la norme ISO 26000, et qu’elle ne reste pas à l’état de théorie.
Enfin, les évolutions technologiques, comme l'intelligence artificielle, vont continuer à impacter le secteur. Il est important de maintenir une veille pour comprendre ces changements et savoir comment les intégrer tout en préservant les valeurs éthiques. C'est-à-dire connaitre les sources citées, être vigilant face aux fake news, s'assurer de la traçabilité des informations communiquées et de leur réalité. La question du sens et de l’éthique dans le travail du communicant va être plus centrale que jamais.